<\/p>\n
La s\u00e9cularisation nous fournit le cadre pour vivre ensemble dans la diversit\u00e9 de nos convictions<\/em><\/h5>\nCela dit, le risque de s\u00e9cularisme existe. C\u2019est celui de la privatisation de la religion. La volont\u00e9 de faire dispara\u00eetre toute religion me semble moins r\u00e9pandue que celle qui veut r\u00e9duire la religion \u00e0 la seule vie priv\u00e9e, comme si la religion n\u2019avait rien \u00e0 voir avec la soci\u00e9t\u00e9. Aucune religion ne peut accepter cette vision des choses, et le christianisme moins que d\u2019autres.<\/div>\nLa libert\u00e9 est un apport mais elle n\u2019est ni absolue, ni sans limites. La culture moderne me dit : \u00ab\u00a0Tu es libre\u00a0\u00bb, mais elle ne me dit pas ce que je dois faire de ma libert\u00e9. Ce n\u2019est pas seulement la question \u00e9thique du permis et du d\u00e9fendu. La question se pose du sens de la vie : qu\u2019est-ce que je vais faire de ma vie ? Quels sont les engagements qui donnent sens et go\u00fbt \u00e0 ma vie ? C\u2019est \u00e0 chacun qu\u2019il revient de d\u00e9cider. Dans nos soci\u00e9t\u00e9s n\u00e9olib\u00e9rales, ce qui compte pour l\u2019individu, c\u2019est la libert\u00e9 et l\u2019\u00e9panouissement et, pour la soci\u00e9t\u00e9, c\u2019est le progr\u00e8s. Mais qu\u2019est-ce que le progr\u00e8s ? L\u2019\u00e9mancipation et le progr\u00e8s deviennent le contenu de la libert\u00e9. On pr\u00e9sente certaines mesures (nous avons eu chez nous l\u2019exemple de l\u2019euthanasie) comme \u00ab\u00a0progressistes\u00a0\u00bb, sans se demander vers quoi elles conduisent. On dit qu\u2019elles repr\u00e9sentent un \u00ab\u00a0pas en avant\u00a0\u00bb, mais vers o\u00f9 ? Paul\u00a0VI invitait \u00e0 ce que l\u2019\u00e9mancipation soit au profit de \u00ab\u00a0tout l\u2019homme\u00a0\u00bb et de \u00ab\u00a0tous les hommes\u00a0\u00bb. Encore une fois, la vis\u00e9e doit \u00eatre le bien commun.<\/div>\nCe n\u2019est pas \u00e0 l\u2019\u00c9tat de r\u00e9pondre \u00e0 la question du sens que je dois donner \u00e0 ma vie. Cela rel\u00e8ve d\u2019autres instances. Le danger existe que la culture religieuse soit remplac\u00e9e par une culture \u00ab\u00a0s\u00e9culariste\u00a0\u00bb qui imposerait une pens\u00e9e unique r\u00e9pondant \u00e0 toutes les questions. Le sch\u00e9ma fondamental de la culture religieuse est conserv\u00e9, avec l\u2019impossibilit\u00e9 de se situer autrement. La s\u00e9cularisation est le cadre qui nous est offert pour nous permettre de vivre dans le respect de l\u2019autre et dans la libert\u00e9.<\/div>\nLes religions apportent une dimension sociale, car un autre danger se pr\u00e9sente, la situation o\u00f9 chacun serait renvoy\u00e9 \u00e0 sa libert\u00e9, sans guide. Ce serait la libert\u00e9 sans la fraternit\u00e9, ce qui ne permet pas de construire une soci\u00e9t\u00e9. Le pape Fran\u00e7ois parle de la \u00ab\u00a0globalisation de l\u2019indiff\u00e9rence\u00a0\u00bb comme cons\u00e9quence de l\u2019individualisme contemporain. Cet apport social vaut pour toutes les religions. Elles peuvent aider les citoyens \u00e0 r\u00e9pondre \u00e0 la question in\u00e9vitable du sens \u00e0 donner \u00e0 son existence, que chaque \u00eatre humain ne peut manquer de se poser. Certes, l\u2019engagement limite ma libert\u00e9. Quand je m\u2019engage pour quelqu\u2019un d\u2019autre, je limite ma libert\u00e9. C\u2019est d\u2019ailleurs une difficult\u00e9 aujourd\u2019hui : on r\u00e9pugne \u00e0 s\u2019engager pour rester libre. Pourtant, ce sont ces engagements, dans la vie personnelle et dans la vie sociale, qui donnent sens \u00e0 l\u2019existence. Ce sont ces engagements qui permettent de construire une soci\u00e9t\u00e9 plus humaine. Et c\u2019est la r\u00e9ponse que j\u2019apporte \u00e0 la privatisation de la foi. Le chr\u00e9tien est aussi un citoyen. Ses options soci\u00e9tales ne sont pas s\u00e9par\u00e9es de sa vie de foi. L\u2019\u00c9vangile m\u2019aide \u00e0 devenir un citoyen responsable, car il m\u2019aide \u00e0 d\u00e9couvrir que ma libert\u00e9 est une libert\u00e9 pour la fraternit\u00e9. C\u2019est bien l\u2019enjeu de l\u2019encyclique\u00a0Fratelli tutti<\/em>\u00a0du pape Fran\u00e7ois (2020). La fraternit\u00e9 donne sens \u00e0 ma libert\u00e9 qui, sans cela, resterait une libert\u00e9 vide.<\/div>\n<\/div>\nComment qualifier la relation entre l\u2019\u00c9glise et la soci\u00e9t\u00e9 ?<\/strong><\/div>\nJ. D. K. :<\/strong>\u00a0La soci\u00e9t\u00e9 nous a ouvert les yeux sur l\u2019\u00c9vangile. Ce n\u2019est pas seulement l\u2019\u00c9vangile qui m\u2019aide \u00e0 prendre conscience de ce qui se passe dans le monde. C\u2019est aussi le monde qui m\u2019aide \u00e0 mieux comprendre l\u2019\u00c9vangile. La fraternit\u00e9 est au c\u0153ur de l\u2019\u00c9vangile. Je suis marqu\u00e9 par l\u2019exemple du prieur du monast\u00e8re de Tibhirine, le fr\u00e8re Christian de Cherg\u00e9, assassin\u00e9 en 1996. Il dit avoir d\u00e9couvert sa vocation de moine \u00e0 cause de son amiti\u00e9 avec un musulman. C\u2019est fort ! \u00c0 la fin de mon livre1<\/sup><\/a>, j\u2019insiste beaucoup sur l\u2019importance de la rencontre, \u00e0 condition bien s\u00fbr qu\u2019elle soit une rencontre authentique et non pas une rencontre avec un \u00ab\u00a0agenda cach\u00e9\u00a0\u00bb, une mani\u00e8re de pros\u00e9lytisme. La rencontre doit proc\u00e9der d\u2019un d\u00e9sir de conna\u00eetre l\u2019autre, de partager quelque chose avec lui. Dans la rencontre, je reste moi-m\u00eame. Christian est rest\u00e9 lui-m\u00eame. Il n\u2019avait pas besoin de devenir musulman pour \u00e9changer avec son ami. C\u2019est l\u2019ouverture et l\u2019amiti\u00e9 qui ont permis la rencontre. Si quelqu\u2019un sent qu\u2019il est utilis\u00e9 au profit d\u2019une cause, quelle qu\u2019elle soit, la rencontre est manqu\u00e9e.<\/div>\nLa soci\u00e9t\u00e9 nous a ouvert les yeux sur l\u2019\u00c9vangile<\/h5>\nLe respect d\u2019autrui a un fondement th\u00e9ologique. L\u2019Esprit de Dieu travaille dans le monde, pas seulement dans l\u2019\u00c9glise. D\u2019ailleurs, quel sens cela aurait, sinon, de \u00ab\u00a0prier pour ceux qui nous gouvernent\u00a0\u00bb ?<\/div>\nIl y a une diversit\u00e9 d\u2019appartenance \u00e0 l\u2019\u00c9glise, diff\u00e9rents degr\u00e9s d\u2019appartenance. L\u2019\u00c9glise doit rester une \u00c9glise ouverte. Beaucoup de gens demandent quelque chose \u00e0 l\u2019\u00c9glise, par exemple le bapt\u00eame de leur enfant ou leur mariage. Il ne faut pas les accueillir comme dans une administration, mais t\u00e2cher de les rencontrer, de leur montrer qu\u2019ils sont bienvenus et surtout de les \u00e9couter. Quand on se sent \u00e9cout\u00e9, respect\u00e9, \u00e7a change tout.<\/div>\n<\/div>\nCela a-t-il toujours \u00e9t\u00e9 le cas dans le pass\u00e9 ?<\/strong><\/div>\nJ. D. K. :<\/strong>\u00a0L\u2019\u00c9glise n\u2019a pas toujours pratiqu\u00e9 la reconnaissance de l\u2019autre. Au moment o\u00f9 le christianisme devient une religion qui d\u00e9finit la culture, ce que j\u2019appelle une \u00ab\u00a0religion culturelle\u00a0\u00bb, il se confronte au pouvoir. L\u2019histoire des Juifs est significative. L\u2019\u00c9glise a toujours \u00e9t\u00e9 dans l\u2019embarras avec le juda\u00efsme car, \u00e0 un certain moment, elle ne peut plus supporter la dissidence. Il faut se remettre en m\u00e9moire ce qu\u2019ont v\u00e9cu les Juifs. Bien s\u00fbr, il y a eu des exceptions, comme un certain \u00ab\u00a0lib\u00e9ralisme\u00a0\u00bb \u00e0 Rome, \u00e0 diff\u00e9rentes \u00e9poques. Est-ce \u00e0 cause du christianisme comme tel ou \u00e0 cause du fait qu\u2019\u00e0 un certain moment, il est devenu une religion culturelle ? Je pencherais personnellement pour la seconde possibilit\u00e9. Je ne crois pas que, comme on le dit souvent, cela a commenc\u00e9 avec Constantin. Ce premier empereur chr\u00e9tien n\u2019a jamais pris de mesures contre les cultes pa\u00efens : ce fut le fait de son successeur Th\u00e9odose \u00e0 la fin du IVe<\/sup>\u00a0si\u00e8cle. Constantin n\u2019a pas d\u00e9truit de temples : sous son r\u00e8gne, la culture restait pluraliste. Une religion culturelle ne supporte aucune dissidence.<\/div>\nIl faut se rendre attentif aux \u00ab\u00a0signes des temps\u00a0\u00bb. C\u2019est la culture moderne qui nous a appris \u00e0 appr\u00e9cier la libert\u00e9 religieuse. Il suffit de se rappeler le\u00a0Syllabus<\/em>\u00a0de Pie\u00a0IX (1864) et le comparer avec la D\u00e9claration du concile Vatican II sur la libert\u00e9 religieuse,\u00a0Dignitatis human\u00e6<\/em>\u00a0(1965). La modernit\u00e9 est une \u00e9preuve pour l\u2019\u00c9glise, mais on apprend en traversant les \u00e9preuves. Le christianisme n\u2019est pas donn\u00e9 une fois pour toutes. Il est une religion historique, intimement li\u00e9e \u00e0 la destin\u00e9e de l\u2019humanit\u00e9. C\u2019est l\u2019id\u00e9e fondamentale que je d\u00e9fends dans mon livre : l\u2019\u00c9glise ne peut pas se d\u00e9finir sans sa relation au monde. Elle est \u00ab\u00a0peuple de Dieu\u00a0\u00bb mais \u00ab\u00a0sacrement du monde\u00a0\u00bb, c\u2019est-\u00e0-dire signe visible et efficace du salut du monde. Elle ne se confond pas avec le monde, mais vit en lui. Le danger est d\u2019en faire une soci\u00e9t\u00e9 \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de la soci\u00e9t\u00e9, comme s\u2019il y avait deux mondes. Il n\u2019y en a qu\u2019un seul. Du point de vue de Dieu, ce qui est \u00e0 sauver n\u2019est pas l\u2019\u00c9glise, mais le monde. J\u2019aime mettre en valeur le d\u00e9but de la Constitution conciliaire sur l\u2019\u00c9glise dans le monde de ce temps,\u00a0Gaudium et spes<\/em>\u00a0(1965) : \u00ab\u00a0Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps [\u2026] sont aussi les joies et les espoirs [\u2026] des disciples du Christ [\u2026]. La communaut\u00e9 des chr\u00e9tiens se reconna\u00eet donc r\u00e9ellement et intimement solidaire du genre humain et de son histoire.\u00a0\u00bb On retrouve cela chez le pape Fran\u00e7ois dont le regard se porte sur le monde. \u00c0 l\u2019encontre de cela, ce qui menace l\u2019\u00c9glise dans nos pays est le repli identitaire, une position qui se d\u00e9sint\u00e9resserait des grandes questions qui pr\u00e9occupent nos contemporains. Un bon indicateur de cela, ce sont les pri\u00e8res universelles pendant la messe, des pri\u00e8res institu\u00e9es par le Concile. On peut se poser la question : expriment-elles le sentiment d\u2019\u00eatre intimement li\u00e9 au sort de l\u2019humanit\u00e9 ?<\/div>\nChez nous, nous \u00e9vitons toute posture revendicatrice, ce qui fait qu\u2019on m\u2019a reproch\u00e9 de ne pas \u00eatre suffisamment \u00ab\u00a0combatif\u00a0\u00bb. Mais je suis convaincu que ce que nous vivons aujourd\u2019hui, en particulier les affaires d\u2019abus sexuels, a \u00e0 voir avec l\u2019id\u00e9e d\u2019une \u00c9glise qui se con\u00e7oit comme \u00e0 part, repli\u00e9e sur son entre-soi. \u00c9vang\u00e9liser, t\u00e9moigner de l\u2019\u00c9vangile, ne signifie pas christianiser. On ne peut pas revenir \u00e0 une soci\u00e9t\u00e9 chr\u00e9tienne. \u00c0 mes yeux, nous ne vivons pas le d\u00e9clin du christianisme. Nous vivons la disparition d\u2019une figure particuli\u00e8re mais elle n\u2019est pas la seule possible. L\u2019\u00c9glise vit dans le monde, pas n\u00e9cessairement dans un monde chr\u00e9tien.<\/div>\n<\/div>\nQuelles sont vos relations avec les autres religions ?<\/strong><\/div>\nJ. D. K. :<\/strong>\u00a0J\u2019insiste volontiers sur le rapport au juda\u00efsme. Deux raisons en disent l\u2019importance. La premi\u00e8re est que l\u2019\u00c9glise ne peut pas se d\u00e9finir sans sa relation \u00e0 lui. Jusqu\u2019au concile Vatican\u00a0II, nous tenions la doctrine de la substitution, selon laquelle, apr\u00e8s le Christ, le juda\u00efsme n\u2019avait plus droit de cit\u00e9. Le Concile a marqu\u00e9 une \u00e9tape d\u00e9cisive en rappelant que \u00ab\u00a0les dons [de Dieu] et [son] appel sont sans repentance\u00a0\u00bb. Il ne s\u2019agit pas seulement de nos sources juives dans la Bible, mais du juda\u00efsme en tant que tel. Jusqu\u2019\u00e0 aujourd\u2019hui, il fait partie du plan de Dieu pour sauver le monde. D\u2019une certaine fa\u00e7on, il a la m\u00eame mission que l\u2019\u00c9glise. Le peuple de Dieu reste \u00ab\u00a0lumi\u00e8re des nations\u00a0\u00bb. On ne peut pas concevoir le juda\u00efsme comme une autre religion. Une deuxi\u00e8me raison est la Shoah, derni\u00e8re \u00e9tape d\u2019une pers\u00e9cution mill\u00e9naire qui n\u2019a pas pour autant an\u00e9anti le peuple juif.<\/div>\nLa question de l\u2019islam, c\u2019est autre chose. Le rapport avec le juda\u00efsme est unique ; il ne peut pas \u00eatre g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9 \u00e0 d\u2019autres religions. Le musulman est un croyant, et doit \u00eatre respect\u00e9 en tant que tel. L\u2019islam est bien pr\u00e9sent dans nos pays europ\u00e9ens. Il s\u2019agit d\u00e9sormais non seulement de vivre ensemble mais aussi de construire ensemble (c\u2019est une expression que je reprends du grand rabbin de Bruxelles). Nous sommes coresponsables de la construction sociale. Il est vrai que, chez nous, l\u2019islam n\u2019a pas d\u2019autre avenir que de s\u2019int\u00e9grer dans la culture s\u00e9cularis\u00e9e. Je ne demande pas qu\u2019il s\u2019assimile, ce qui voudrait dire qu\u2019il perde son identit\u00e9. Le paradoxe est qu\u2019une culture s\u00e9cularis\u00e9e a peur de l\u2019islam. Je ne nie pas les probl\u00e8mes soulev\u00e9s par l\u2019extr\u00e9misme, mais tous les musulmans sont loin d\u2019\u00eatre extr\u00e9mistes. Ici, \u00e0 Malines, le pourcentage de musulmans est \u00e9lev\u00e9, mais nous vivons dans la paix.<\/div>\n\u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ?<\/h5>\nLa rencontre avec les musulmans est rendue plus difficile par le fait que l\u2019islam n\u2019a pas de structure unifi\u00e9e, en d\u00e9pit de l\u2019instauration d\u2019un \u00ab\u00a0ex\u00e9cutif\u00a0\u00bb pour g\u00e9rer les relations avec l\u2019\u00c9tat. Mais, dans l\u2019ensemble, il y a de bons contacts.<\/div>\nOn peut ajouter qu\u2019en Belgique, toutes les religions sont sur un pied d\u2019\u00e9galit\u00e9. Nous avons certes conserv\u00e9 la tradition du\u00a0Te deum<\/em>\u00a0chant\u00e9 \u00e0 la cath\u00e9drale de Bruxelles pour le 21\u00a0juillet (la f\u00eate nationale) et celle du 15\u00a0novembre (la f\u00eate du Roi), en pr\u00e9sence du roi et des corps constitu\u00e9s. Les autres religions sont aussi pr\u00e9sentes et leurs responsables viennent volontiers. Lorsque les religions sont consult\u00e9es par le gouvernement, c\u2019est toujours ensemble. La situation est diff\u00e9rente en France o\u00f9 il existe des relations bilat\u00e9rales avec l\u2019\u00c9glise catholique.<\/div>\n<\/div>\nNous voudrions terminer par une question plus personnelle. Vous avez travers\u00e9 un cancer. O\u00f9 puisez-vous l\u2019optimisme qui vous anime ?<\/strong><\/div>\nJ. D. K. :<\/strong>\u00a0Je me consid\u00e8re plus r\u00e9aliste qu\u2019optimiste. \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve qu\u2019a repr\u00e9sent\u00e9e la maladie, j\u2019ai toujours gard\u00e9 confiance. \u00c0 vrai dire, je ne sais pas r\u00e9pondre \u00e0 votre question. On ne d\u00e9cide pas d\u2019avoir confiance : cela nous est donn\u00e9. Malgr\u00e9 le choc qu\u2019a \u00e9t\u00e9 l\u2019annonce de mon cancer, car je n\u2019avais jamais envisag\u00e9 cette possibilit\u00e9, ayant toujours \u00e9t\u00e9 en bonne sant\u00e9, je n\u2019ai jamais connu l\u2019angoisse. J\u2019ai v\u00e9cu ce temps comme un d\u00e9tour, aussi sur le plan spirituel. La pri\u00e8re a \u00e9t\u00e9 un soutien. La maladie m\u2019a appris \u00e0 vivre avec mes limites et mes fragilit\u00e9s. Redisons encore une fois qu\u2019il n\u2019y a pas de libert\u00e9 absolue, sans limites. La vie authentique n\u2019est pas un \u00e9panouissement sans limites. La confrontation avec ses propres fragilit\u00e9s change beaucoup de choses : on en sort transform\u00e9.<\/div>\nJ\u2019esp\u00e8re que ce sera aussi le cas pour la soci\u00e9t\u00e9 lorsque, la pand\u00e9mie \u00e9tant termin\u00e9e, on reviendra \u00e0 la \u00ab\u00a0vie normale\u00a0\u00bb. \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ? L\u2019\u00c9glise a un message de fraternit\u00e9 \u00e0 transmettre. Mais cela n\u00e9cessite une r\u00e9forme en profondeur. Je crois \u00e0 son avenir, \u00e0 condition qu\u2019elle sache tourner la page et renoncer \u00e0 une attitude de surplomb. Le mot \u00ab\u00a0humilit\u00e9\u00a0\u00bb est peut-\u00eatre us\u00e9, mais je n\u2019en trouve pas d\u2019autre. C\u2019est \u00e0 cela que l\u2019\u00c9vangile nous invite. Nous devons nous tenir \u00ab\u00a0en humble place\u00a0\u00bb. Notre parole est \u00ab\u00a0confessante\u00a0\u00bb : nous n\u2019avons pas honte de dire ce que nous croyons, faire conna\u00eetre l\u2019amour de Dieu, mais dans le respect de l\u2019autre. Je termine mon livre en \u00e9non\u00e7ant quatre points : l\u2019\u00c9glise \u00e0 venir sera plus humble, plus petite, plus confessante et plus ouverte2<\/sup><\/a>. Comme le dit le pape Fran\u00e7ois, le danger n\u2019est pas de devenir moins nombreux, mais de devenir insignifiants.<\/div>\n\n<\/div>\nNOTES\u00a0:<\/div>\n1\u00a0J.\u00a0De Kesel,\u00a0Foi et religion dans une soci\u00e9t\u00e9 moderne<\/em>, Salvator, 2021.<\/div>\n2\u00a0J.\u00a0De Kesel,\u00a0op.\u00a0cit.<\/em>, pp.\u00a0135-138.<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"[…] La soci\u00e9t\u00e9 nous a ouvert les yeux sur l\u2019\u00c9vangile […] \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ? […]
\nEntretien du Cardinal Joseph de Kesel (archev\u00eaque de Malines-Bruxelles), rapport\u00e9 par la revue de culture contemporaine ETUDES dans le num\u00e9ro de d\u00e9cembre 2021.<\/p>\n","protected":false},"author":361,"featured_media":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","ctc_sermon_book":[],"ctc_sermon_series":[],"ctc_sermon_speaker":[514],"ctc_sermon_tag":[],"class_list":["post-9945","ctc_sermon","type-ctc_sermon","status-publish","hentry","ctc_sermon_topic-articles-dactualite","ctc_sermon_topic-synode","ctc_sermon_speaker-cardinal-joseph-de-kesel","ctfw-no-image"],"yoast_head":"\n
La n\u00e9cessaire transformation de l'Eglise<\/title>\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\t\n
La soci\u00e9t\u00e9 nous a ouvert les yeux sur l\u2019\u00c9vangile<\/h5>\nLe respect d\u2019autrui a un fondement th\u00e9ologique. L\u2019Esprit de Dieu travaille dans le monde, pas seulement dans l\u2019\u00c9glise. D\u2019ailleurs, quel sens cela aurait, sinon, de \u00ab\u00a0prier pour ceux qui nous gouvernent\u00a0\u00bb ?<\/div>\nIl y a une diversit\u00e9 d\u2019appartenance \u00e0 l\u2019\u00c9glise, diff\u00e9rents degr\u00e9s d\u2019appartenance. L\u2019\u00c9glise doit rester une \u00c9glise ouverte. Beaucoup de gens demandent quelque chose \u00e0 l\u2019\u00c9glise, par exemple le bapt\u00eame de leur enfant ou leur mariage. Il ne faut pas les accueillir comme dans une administration, mais t\u00e2cher de les rencontrer, de leur montrer qu\u2019ils sont bienvenus et surtout de les \u00e9couter. Quand on se sent \u00e9cout\u00e9, respect\u00e9, \u00e7a change tout.<\/div>\n<\/div>\nCela a-t-il toujours \u00e9t\u00e9 le cas dans le pass\u00e9 ?<\/strong><\/div>\nJ. D. K. :<\/strong>\u00a0L\u2019\u00c9glise n\u2019a pas toujours pratiqu\u00e9 la reconnaissance de l\u2019autre. Au moment o\u00f9 le christianisme devient une religion qui d\u00e9finit la culture, ce que j\u2019appelle une \u00ab\u00a0religion culturelle\u00a0\u00bb, il se confronte au pouvoir. L\u2019histoire des Juifs est significative. L\u2019\u00c9glise a toujours \u00e9t\u00e9 dans l\u2019embarras avec le juda\u00efsme car, \u00e0 un certain moment, elle ne peut plus supporter la dissidence. Il faut se remettre en m\u00e9moire ce qu\u2019ont v\u00e9cu les Juifs. Bien s\u00fbr, il y a eu des exceptions, comme un certain \u00ab\u00a0lib\u00e9ralisme\u00a0\u00bb \u00e0 Rome, \u00e0 diff\u00e9rentes \u00e9poques. Est-ce \u00e0 cause du christianisme comme tel ou \u00e0 cause du fait qu\u2019\u00e0 un certain moment, il est devenu une religion culturelle ? Je pencherais personnellement pour la seconde possibilit\u00e9. Je ne crois pas que, comme on le dit souvent, cela a commenc\u00e9 avec Constantin. Ce premier empereur chr\u00e9tien n\u2019a jamais pris de mesures contre les cultes pa\u00efens : ce fut le fait de son successeur Th\u00e9odose \u00e0 la fin du IVe<\/sup>\u00a0si\u00e8cle. Constantin n\u2019a pas d\u00e9truit de temples : sous son r\u00e8gne, la culture restait pluraliste. Une religion culturelle ne supporte aucune dissidence.<\/div>\nIl faut se rendre attentif aux \u00ab\u00a0signes des temps\u00a0\u00bb. C\u2019est la culture moderne qui nous a appris \u00e0 appr\u00e9cier la libert\u00e9 religieuse. Il suffit de se rappeler le\u00a0Syllabus<\/em>\u00a0de Pie\u00a0IX (1864) et le comparer avec la D\u00e9claration du concile Vatican II sur la libert\u00e9 religieuse,\u00a0Dignitatis human\u00e6<\/em>\u00a0(1965). La modernit\u00e9 est une \u00e9preuve pour l\u2019\u00c9glise, mais on apprend en traversant les \u00e9preuves. Le christianisme n\u2019est pas donn\u00e9 une fois pour toutes. Il est une religion historique, intimement li\u00e9e \u00e0 la destin\u00e9e de l\u2019humanit\u00e9. C\u2019est l\u2019id\u00e9e fondamentale que je d\u00e9fends dans mon livre : l\u2019\u00c9glise ne peut pas se d\u00e9finir sans sa relation au monde. Elle est \u00ab\u00a0peuple de Dieu\u00a0\u00bb mais \u00ab\u00a0sacrement du monde\u00a0\u00bb, c\u2019est-\u00e0-dire signe visible et efficace du salut du monde. Elle ne se confond pas avec le monde, mais vit en lui. Le danger est d\u2019en faire une soci\u00e9t\u00e9 \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de la soci\u00e9t\u00e9, comme s\u2019il y avait deux mondes. Il n\u2019y en a qu\u2019un seul. Du point de vue de Dieu, ce qui est \u00e0 sauver n\u2019est pas l\u2019\u00c9glise, mais le monde. J\u2019aime mettre en valeur le d\u00e9but de la Constitution conciliaire sur l\u2019\u00c9glise dans le monde de ce temps,\u00a0Gaudium et spes<\/em>\u00a0(1965) : \u00ab\u00a0Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps [\u2026] sont aussi les joies et les espoirs [\u2026] des disciples du Christ [\u2026]. La communaut\u00e9 des chr\u00e9tiens se reconna\u00eet donc r\u00e9ellement et intimement solidaire du genre humain et de son histoire.\u00a0\u00bb On retrouve cela chez le pape Fran\u00e7ois dont le regard se porte sur le monde. \u00c0 l\u2019encontre de cela, ce qui menace l\u2019\u00c9glise dans nos pays est le repli identitaire, une position qui se d\u00e9sint\u00e9resserait des grandes questions qui pr\u00e9occupent nos contemporains. Un bon indicateur de cela, ce sont les pri\u00e8res universelles pendant la messe, des pri\u00e8res institu\u00e9es par le Concile. On peut se poser la question : expriment-elles le sentiment d\u2019\u00eatre intimement li\u00e9 au sort de l\u2019humanit\u00e9 ?<\/div>\nChez nous, nous \u00e9vitons toute posture revendicatrice, ce qui fait qu\u2019on m\u2019a reproch\u00e9 de ne pas \u00eatre suffisamment \u00ab\u00a0combatif\u00a0\u00bb. Mais je suis convaincu que ce que nous vivons aujourd\u2019hui, en particulier les affaires d\u2019abus sexuels, a \u00e0 voir avec l\u2019id\u00e9e d\u2019une \u00c9glise qui se con\u00e7oit comme \u00e0 part, repli\u00e9e sur son entre-soi. \u00c9vang\u00e9liser, t\u00e9moigner de l\u2019\u00c9vangile, ne signifie pas christianiser. On ne peut pas revenir \u00e0 une soci\u00e9t\u00e9 chr\u00e9tienne. \u00c0 mes yeux, nous ne vivons pas le d\u00e9clin du christianisme. Nous vivons la disparition d\u2019une figure particuli\u00e8re mais elle n\u2019est pas la seule possible. L\u2019\u00c9glise vit dans le monde, pas n\u00e9cessairement dans un monde chr\u00e9tien.<\/div>\n<\/div>\nQuelles sont vos relations avec les autres religions ?<\/strong><\/div>\nJ. D. K. :<\/strong>\u00a0J\u2019insiste volontiers sur le rapport au juda\u00efsme. Deux raisons en disent l\u2019importance. La premi\u00e8re est que l\u2019\u00c9glise ne peut pas se d\u00e9finir sans sa relation \u00e0 lui. Jusqu\u2019au concile Vatican\u00a0II, nous tenions la doctrine de la substitution, selon laquelle, apr\u00e8s le Christ, le juda\u00efsme n\u2019avait plus droit de cit\u00e9. Le Concile a marqu\u00e9 une \u00e9tape d\u00e9cisive en rappelant que \u00ab\u00a0les dons [de Dieu] et [son] appel sont sans repentance\u00a0\u00bb. Il ne s\u2019agit pas seulement de nos sources juives dans la Bible, mais du juda\u00efsme en tant que tel. Jusqu\u2019\u00e0 aujourd\u2019hui, il fait partie du plan de Dieu pour sauver le monde. D\u2019une certaine fa\u00e7on, il a la m\u00eame mission que l\u2019\u00c9glise. Le peuple de Dieu reste \u00ab\u00a0lumi\u00e8re des nations\u00a0\u00bb. On ne peut pas concevoir le juda\u00efsme comme une autre religion. Une deuxi\u00e8me raison est la Shoah, derni\u00e8re \u00e9tape d\u2019une pers\u00e9cution mill\u00e9naire qui n\u2019a pas pour autant an\u00e9anti le peuple juif.<\/div>\nLa question de l\u2019islam, c\u2019est autre chose. Le rapport avec le juda\u00efsme est unique ; il ne peut pas \u00eatre g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9 \u00e0 d\u2019autres religions. Le musulman est un croyant, et doit \u00eatre respect\u00e9 en tant que tel. L\u2019islam est bien pr\u00e9sent dans nos pays europ\u00e9ens. Il s\u2019agit d\u00e9sormais non seulement de vivre ensemble mais aussi de construire ensemble (c\u2019est une expression que je reprends du grand rabbin de Bruxelles). Nous sommes coresponsables de la construction sociale. Il est vrai que, chez nous, l\u2019islam n\u2019a pas d\u2019autre avenir que de s\u2019int\u00e9grer dans la culture s\u00e9cularis\u00e9e. Je ne demande pas qu\u2019il s\u2019assimile, ce qui voudrait dire qu\u2019il perde son identit\u00e9. Le paradoxe est qu\u2019une culture s\u00e9cularis\u00e9e a peur de l\u2019islam. Je ne nie pas les probl\u00e8mes soulev\u00e9s par l\u2019extr\u00e9misme, mais tous les musulmans sont loin d\u2019\u00eatre extr\u00e9mistes. Ici, \u00e0 Malines, le pourcentage de musulmans est \u00e9lev\u00e9, mais nous vivons dans la paix.<\/div>\n\u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ?<\/h5>\nLa rencontre avec les musulmans est rendue plus difficile par le fait que l\u2019islam n\u2019a pas de structure unifi\u00e9e, en d\u00e9pit de l\u2019instauration d\u2019un \u00ab\u00a0ex\u00e9cutif\u00a0\u00bb pour g\u00e9rer les relations avec l\u2019\u00c9tat. Mais, dans l\u2019ensemble, il y a de bons contacts.<\/div>\nOn peut ajouter qu\u2019en Belgique, toutes les religions sont sur un pied d\u2019\u00e9galit\u00e9. Nous avons certes conserv\u00e9 la tradition du\u00a0Te deum<\/em>\u00a0chant\u00e9 \u00e0 la cath\u00e9drale de Bruxelles pour le 21\u00a0juillet (la f\u00eate nationale) et celle du 15\u00a0novembre (la f\u00eate du Roi), en pr\u00e9sence du roi et des corps constitu\u00e9s. Les autres religions sont aussi pr\u00e9sentes et leurs responsables viennent volontiers. Lorsque les religions sont consult\u00e9es par le gouvernement, c\u2019est toujours ensemble. La situation est diff\u00e9rente en France o\u00f9 il existe des relations bilat\u00e9rales avec l\u2019\u00c9glise catholique.<\/div>\n<\/div>\nNous voudrions terminer par une question plus personnelle. Vous avez travers\u00e9 un cancer. O\u00f9 puisez-vous l\u2019optimisme qui vous anime ?<\/strong><\/div>\nJ. D. K. :<\/strong>\u00a0Je me consid\u00e8re plus r\u00e9aliste qu\u2019optimiste. \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve qu\u2019a repr\u00e9sent\u00e9e la maladie, j\u2019ai toujours gard\u00e9 confiance. \u00c0 vrai dire, je ne sais pas r\u00e9pondre \u00e0 votre question. On ne d\u00e9cide pas d\u2019avoir confiance : cela nous est donn\u00e9. Malgr\u00e9 le choc qu\u2019a \u00e9t\u00e9 l\u2019annonce de mon cancer, car je n\u2019avais jamais envisag\u00e9 cette possibilit\u00e9, ayant toujours \u00e9t\u00e9 en bonne sant\u00e9, je n\u2019ai jamais connu l\u2019angoisse. J\u2019ai v\u00e9cu ce temps comme un d\u00e9tour, aussi sur le plan spirituel. La pri\u00e8re a \u00e9t\u00e9 un soutien. La maladie m\u2019a appris \u00e0 vivre avec mes limites et mes fragilit\u00e9s. Redisons encore une fois qu\u2019il n\u2019y a pas de libert\u00e9 absolue, sans limites. La vie authentique n\u2019est pas un \u00e9panouissement sans limites. La confrontation avec ses propres fragilit\u00e9s change beaucoup de choses : on en sort transform\u00e9.<\/div>\nJ\u2019esp\u00e8re que ce sera aussi le cas pour la soci\u00e9t\u00e9 lorsque, la pand\u00e9mie \u00e9tant termin\u00e9e, on reviendra \u00e0 la \u00ab\u00a0vie normale\u00a0\u00bb. \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ? L\u2019\u00c9glise a un message de fraternit\u00e9 \u00e0 transmettre. Mais cela n\u00e9cessite une r\u00e9forme en profondeur. Je crois \u00e0 son avenir, \u00e0 condition qu\u2019elle sache tourner la page et renoncer \u00e0 une attitude de surplomb. Le mot \u00ab\u00a0humilit\u00e9\u00a0\u00bb est peut-\u00eatre us\u00e9, mais je n\u2019en trouve pas d\u2019autre. C\u2019est \u00e0 cela que l\u2019\u00c9vangile nous invite. Nous devons nous tenir \u00ab\u00a0en humble place\u00a0\u00bb. Notre parole est \u00ab\u00a0confessante\u00a0\u00bb : nous n\u2019avons pas honte de dire ce que nous croyons, faire conna\u00eetre l\u2019amour de Dieu, mais dans le respect de l\u2019autre. Je termine mon livre en \u00e9non\u00e7ant quatre points : l\u2019\u00c9glise \u00e0 venir sera plus humble, plus petite, plus confessante et plus ouverte2<\/sup><\/a>. Comme le dit le pape Fran\u00e7ois, le danger n\u2019est pas de devenir moins nombreux, mais de devenir insignifiants.<\/div>\n\n<\/div>\nNOTES\u00a0:<\/div>\n1\u00a0J.\u00a0De Kesel,\u00a0Foi et religion dans une soci\u00e9t\u00e9 moderne<\/em>, Salvator, 2021.<\/div>\n2\u00a0J.\u00a0De Kesel,\u00a0op.\u00a0cit.<\/em>, pp.\u00a0135-138.<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"[…] La soci\u00e9t\u00e9 nous a ouvert les yeux sur l\u2019\u00c9vangile […] \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ? […]
\nEntretien du Cardinal Joseph de Kesel (archev\u00eaque de Malines-Bruxelles), rapport\u00e9 par la revue de culture contemporaine ETUDES dans le num\u00e9ro de d\u00e9cembre 2021.<\/p>\n","protected":false},"author":361,"featured_media":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","ctc_sermon_book":[],"ctc_sermon_series":[],"ctc_sermon_speaker":[514],"ctc_sermon_tag":[],"class_list":["post-9945","ctc_sermon","type-ctc_sermon","status-publish","hentry","ctc_sermon_topic-articles-dactualite","ctc_sermon_topic-synode","ctc_sermon_speaker-cardinal-joseph-de-kesel","ctfw-no-image"],"yoast_head":"\n
La n\u00e9cessaire transformation de l'Eglise<\/title>\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\t\n
\u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ?<\/h5>\nLa rencontre avec les musulmans est rendue plus difficile par le fait que l\u2019islam n\u2019a pas de structure unifi\u00e9e, en d\u00e9pit de l\u2019instauration d\u2019un \u00ab\u00a0ex\u00e9cutif\u00a0\u00bb pour g\u00e9rer les relations avec l\u2019\u00c9tat. Mais, dans l\u2019ensemble, il y a de bons contacts.<\/div>\nOn peut ajouter qu\u2019en Belgique, toutes les religions sont sur un pied d\u2019\u00e9galit\u00e9. Nous avons certes conserv\u00e9 la tradition du\u00a0Te deum<\/em>\u00a0chant\u00e9 \u00e0 la cath\u00e9drale de Bruxelles pour le 21\u00a0juillet (la f\u00eate nationale) et celle du 15\u00a0novembre (la f\u00eate du Roi), en pr\u00e9sence du roi et des corps constitu\u00e9s. Les autres religions sont aussi pr\u00e9sentes et leurs responsables viennent volontiers. Lorsque les religions sont consult\u00e9es par le gouvernement, c\u2019est toujours ensemble. La situation est diff\u00e9rente en France o\u00f9 il existe des relations bilat\u00e9rales avec l\u2019\u00c9glise catholique.<\/div>\n<\/div>\nNous voudrions terminer par une question plus personnelle. Vous avez travers\u00e9 un cancer. O\u00f9 puisez-vous l\u2019optimisme qui vous anime ?<\/strong><\/div>\nJ. D. K. :<\/strong>\u00a0Je me consid\u00e8re plus r\u00e9aliste qu\u2019optimiste. \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve qu\u2019a repr\u00e9sent\u00e9e la maladie, j\u2019ai toujours gard\u00e9 confiance. \u00c0 vrai dire, je ne sais pas r\u00e9pondre \u00e0 votre question. On ne d\u00e9cide pas d\u2019avoir confiance : cela nous est donn\u00e9. Malgr\u00e9 le choc qu\u2019a \u00e9t\u00e9 l\u2019annonce de mon cancer, car je n\u2019avais jamais envisag\u00e9 cette possibilit\u00e9, ayant toujours \u00e9t\u00e9 en bonne sant\u00e9, je n\u2019ai jamais connu l\u2019angoisse. J\u2019ai v\u00e9cu ce temps comme un d\u00e9tour, aussi sur le plan spirituel. La pri\u00e8re a \u00e9t\u00e9 un soutien. La maladie m\u2019a appris \u00e0 vivre avec mes limites et mes fragilit\u00e9s. Redisons encore une fois qu\u2019il n\u2019y a pas de libert\u00e9 absolue, sans limites. La vie authentique n\u2019est pas un \u00e9panouissement sans limites. La confrontation avec ses propres fragilit\u00e9s change beaucoup de choses : on en sort transform\u00e9.<\/div>\nJ\u2019esp\u00e8re que ce sera aussi le cas pour la soci\u00e9t\u00e9 lorsque, la pand\u00e9mie \u00e9tant termin\u00e9e, on reviendra \u00e0 la \u00ab\u00a0vie normale\u00a0\u00bb. \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ? L\u2019\u00c9glise a un message de fraternit\u00e9 \u00e0 transmettre. Mais cela n\u00e9cessite une r\u00e9forme en profondeur. Je crois \u00e0 son avenir, \u00e0 condition qu\u2019elle sache tourner la page et renoncer \u00e0 une attitude de surplomb. Le mot \u00ab\u00a0humilit\u00e9\u00a0\u00bb est peut-\u00eatre us\u00e9, mais je n\u2019en trouve pas d\u2019autre. C\u2019est \u00e0 cela que l\u2019\u00c9vangile nous invite. Nous devons nous tenir \u00ab\u00a0en humble place\u00a0\u00bb. Notre parole est \u00ab\u00a0confessante\u00a0\u00bb : nous n\u2019avons pas honte de dire ce que nous croyons, faire conna\u00eetre l\u2019amour de Dieu, mais dans le respect de l\u2019autre. Je termine mon livre en \u00e9non\u00e7ant quatre points : l\u2019\u00c9glise \u00e0 venir sera plus humble, plus petite, plus confessante et plus ouverte2<\/sup><\/a>. Comme le dit le pape Fran\u00e7ois, le danger n\u2019est pas de devenir moins nombreux, mais de devenir insignifiants.<\/div>\n\n<\/div>\nNOTES\u00a0:<\/div>\n1\u00a0J.\u00a0De Kesel,\u00a0Foi et religion dans une soci\u00e9t\u00e9 moderne<\/em>, Salvator, 2021.<\/div>\n2\u00a0J.\u00a0De Kesel,\u00a0op.\u00a0cit.<\/em>, pp.\u00a0135-138.<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"[…] La soci\u00e9t\u00e9 nous a ouvert les yeux sur l\u2019\u00c9vangile […] \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ? […]
\nEntretien du Cardinal Joseph de Kesel (archev\u00eaque de Malines-Bruxelles), rapport\u00e9 par la revue de culture contemporaine ETUDES dans le num\u00e9ro de d\u00e9cembre 2021.<\/p>\n","protected":false},"author":361,"featured_media":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","ctc_sermon_book":[],"ctc_sermon_series":[],"ctc_sermon_speaker":[514],"ctc_sermon_tag":[],"class_list":["post-9945","ctc_sermon","type-ctc_sermon","status-publish","hentry","ctc_sermon_topic-articles-dactualite","ctc_sermon_topic-synode","ctc_sermon_speaker-cardinal-joseph-de-kesel","ctfw-no-image"],"yoast_head":"\n
La n\u00e9cessaire transformation de l'Eglise<\/title>\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\n\t\n
[…] La soci\u00e9t\u00e9 nous a ouvert les yeux sur l\u2019\u00c9vangile […] \u00c0 travers l\u2019\u00e9preuve, aurons-nous d\u00e9couvert la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une plus grande solidarit\u00e9 ? […]
\nEntretien du Cardinal Joseph de Kesel (archev\u00eaque de Malines-Bruxelles), rapport\u00e9 par la revue de culture contemporaine ETUDES dans le num\u00e9ro de d\u00e9cembre 2021.<\/p>\n","protected":false},"author":361,"featured_media":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","ctc_sermon_book":[],"ctc_sermon_series":[],"ctc_sermon_speaker":[514],"ctc_sermon_tag":[],"class_list":["post-9945","ctc_sermon","type-ctc_sermon","status-publish","hentry","ctc_sermon_topic-articles-dactualite","ctc_sermon_topic-synode","ctc_sermon_speaker-cardinal-joseph-de-kesel","ctfw-no-image"],"yoast_head":"\n