L’eau de la rivière dans laquelle se noie le désespéré n’est pas une autre que celle qui fait prospérer et fructifier les arbres de ses rives. L’eau du baptême dans laquelle les parents viennent chercher pour leur enfant une vie belle et sûre, signifie pourtant la mort du Seigneur englouti dans les flots noirs du pire supplice par lequel on retranchait le condamné du monde. Ainsi, l’eau vive que promet le Christ à la femme de Samarie est-elle celle qui coulera de son côté ouvert par la lance après sa mort sur la croix.
Dans cet évangile de la Samaritaine, celui de l’année A que nous prenons pour les catéchumènes adultes, il n’est pas question d’arbre ni de fruit, mais de Jésus et de salaire : « Dès maintenant le moissonneur reçoit son salaire : il récolte du fruit pour la vie éternelle ». En effet, les Samaritains étaient morts à la promesse, eux que les Juifs estimaient déchus de l’Alliance, « pires que des païens » disaient-ils, puisque retranchés du Peuple. Mais en acceptant d’être lui-même retranché, le Christ les a rétablis dans la grâce.
Ainsi, la parabole du figuier dans la vigne (évangile de ce 3e dimanche de carême en année C) qui semble viser les pécheurs impénitents, parle de façon plus mystérieuse et cachée de celui qui a donné sa vie pour les pécheurs. Les chefs religieux qui ont comploté contre lui triomphent au
pied de la croix : cette mort est la preuve que Jésus était un imposteur puisqu’elle met un terme lamentable à son entreprise de prédication. Mais ils sont aveugles au sacrifice du Fils qui obtient le salut des pécheurs et le leur.
« Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même », disait le Seigneur à ceux qui pensaient que la mort infâme était un châtiment forcément mérité. Mais ce n’était pas son dernier mot : ressuscité, il enverra ses Apôtres annoncer que tous sont appelés au « mourir à soi-même » par lequel les pécheurs se convertissent, rentrant ainsi dans la communauté de miséricorde de ceux à qui il a été fait grâce. La vocation de tout homme est de devenir un fruit de celui dont Dieu a fait pour nous l’Arbre de vie.
Père Marc Lambret