L’impératif est paradoxal pour un sentiment spontané par nature : la joie éclot dans un cœur surpris par ce mouvement comme lorsqu’on « éclate de rire ». Mais certaines circonstances exigent la réjouissance : les noces sont de celles-là. Pourtant, tous les mariages ne sont pas sans nuages. Tant de facteurs entrent en compte qui peuvent constituer autant de sujets de préoccupation et de conflits : familiaux, économiques et sociaux, sans oublier les sentiments personnels des fiancés ! Quoi qu’il en soit, la décence impose que la fête soit joyeuse, fallût-il pour cela faire couler l’alcool à flots plus que de raison.
Faut-il chercher là une explication à l’étrange particularité des Noces de Cana où l’on voit Jésus changer six cents litres d’eau en vin pour une assemblée de bourgade qui a déjà consommé toute la quantité prévue au titre de l’évènement et, manifestement, n’en a pas assez ? Peut-être serions-nous plus avisés de trouver dans cette incongruité une incitation de plus à ne pas nous laisser enfermer dans l’apparence d’un récit anecdotique. Laissons-nous plutôt porter franchement vers son interprétation théologique : ce texte nous parle des Noces de l’Agneau, la nouvelle Alliance que le
Christ scelle dans son sang.
Sous le voile d’une fête de mariage au village, Jean nous dit le mystère pascal célébré en toute Eucharistie où l’unique sacrifice du Christ est rendu actuel. Or, en ce drame sanglant dans la contemplation duquel il est juste que nous versions des larmes de douleur, la foi reconnaît le combat décisif où Dieu remporte la victoire sur le mal, afin de libérer l’humanité et le monde du péché et de la mort. Le fruit de la croix, par la puissance de la
résurrection du Seigneur, est l’Esprit Saint répandu à flots sur toute chair. C’est lui qui fit l’assurance et l’enthousiasme des Apôtres à la Pentecôte, qu’il soit aujourd’hui notre force et notre joie !
Père Marc Lambret