« Le Christ, notre Pâque ! » (1 Cor 5,7)

L’Avent, le chant de l’attente

En entrant dans le temps liturgique de l’Avent, l’Eglise célèbre l’attente du Christ qui vient s’incarner dans notre temps et notre Histoire, nous redisant inlassablement la parole que Jean le Baptiste entendra au Jourdain jointe à celle du psalmiste : « Voici mon fils bien-aimé en qui j’ai mis tout mon Amour » (Mat.3.17) et « Avant l’étoile du matin, de mon sein, je t’ai engendré » (Ps. 2 et 109).

Entrer dans l’Avent avec les chants de la Liturgie Chorale du Peuple de Dieu, c’est entrer directement dans cette Histoire commune aux traditions orientales et occidentales dès le commencement du christianisme tant par leurs textes que par leurs musiques. C’est aussi s’approprier l’héritage de nos prédécesseurs afin d’aller avec eux, à la rencontre du Soleil de justice qui a établi sa demeure parmi nous.

Par les citations aux traditions grégoriennes ou byzantines, le chant populaire des « noëls » ou les compositions originales d’André Gouzes, nous nous unissons à cet émerveillement intemporel du Dieu qui se fait enfant comme nous pour que nous soyons Dieu comme Lui.

Au travers de quelques chants emblématiques de nos vigiles de l’Avent, nous pouvons goûter ce grand patrimoine musical et poétique offert à notre méditation par les frères André Gouzes, Jean-Philippe Revel et Daniel Bourgeois.

  • Pour le « Joyeuse Lumière » : la musique est inspirée d’une mélodie de la tradition slavonne. Par sa tonalité mineure, il est le portique qui nous fait entrer dans l’office de façon sereine dans l’attente patiente du retour du Fils de l’Homme.
  • L’antienne « Réjouis-toi Jérusalem » est basé sur un chant de noël populaire du XVe s. Ce dernier est une des nombreuses adaptations du texte de l’hymne des Vêpres de Noël « Christe redemptor omnium » attribuée à Helisachar de Saint-Riquier (ou de Jumièges, IXème siècle) dont voici le premier verset : « Christe, redemptor omnium, / ex Patre, Patris Unice, / solus ante principium / natus ineffabiliter. » (Christ rédempteur de toute chose / issu du Père et Fils unique / Toi seul, avant le commencement / es né de façon inexprimable).
    Le texte du XVe s. est une adaptation populaire faite pour coller à la mélodie que nous connaissons (probablement une chanson profane) puis devient encore plus populaire dans la version française du XVIe s. (voir ci-dessous). C’est dans cette dernière version que les compositeurs français des XVIIe et XVIIIe s. puiseront pour en faire des variations pour orgue. On doit chanter cette antienne de façon joyeuse et tonique.
    (retrouvez un exemple sonore ICI).
  • L’Alléluia avant l’Evangile : André Gouzes reprend ici un Alléluia extrait du premier cathisme (premier groupe de psaumes) de la tradition slavonne (« Bienheureux, Alléluia, l’homme qui ne suit pas le conseil des impies ». Ps. 1, éditions de Chevetogne).
    (retrouvez un exemple sonore ICI).
  • Le répons « Cieux répandez votre justice » est la stricte adaptation française du chant latin « Rorate coeli desuper ». Écrit par les Oratoriens soucieux en 1612 d’un chant « populaire » pouvant faciliter l’assimilation des Ecritures, il est basé sur plusieurs versets du prophète Isaïe (40 :1 ; 41 :10-14 ; 49 :13-16 ; 51 :3-12 ; 60 :1…) ainsi que sur une antienne grégorienne plus ancienne (chant d’entrée de la messe du IVe dimanche de l’Avent) . Qu’on les chante ou non au cours de l’office (à la vénération de la Parole par exemple si elle a lieu), c’est une belle occasion pour méditer ces textes magnifiques. On peut également le prendre pendant l’Avent lors des complies familiales.
    (retrouvez un exemple sonore ICI, avec un verset en latin et un en français).
  • « Voici la demeure de Dieu parmi les hommes » : En conclusion de l’office de l’Attente, ce chant est une composition originale d’André Gouzes, plein de tendresse et de douceur. Ecrit en mode mineur propice à la méditation et la tranquillité, il nous fait désigner et regarder « celle qui montre le chemin » (Odigitria en grec). On veillera à la chanter de façon paisible et sereine mais dynamique.

A nous de nous saisir de cet héritage à pleines mains et de nous l’approprier afin d’aller de l’avant avec élan, d’entrer dans la louange intemporelle de l’Epoux qui vient nous « fiancer à lui dans la tendresse et la fidélité » (Liturgie des Noces de Cana).

Jean-Philippe Fourcade, chantre.