Les Apôtres se posent peut-être la question en entendant le Seigneur, à la veille de sa passion, leur dire : « Comme je vous aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres ». Ils ne l’ont pas encore vu offrir sa vie pour eux et pour la multitude par le sacrifice de la croix, donnant là, à eux comme à nous, l’exemple principal.
De toute façon, il les a aimés avant puisqu’en ce dernier repas l’évangéliste nous dit qu’il les aima « jusqu’au bout ». Et cet amour n’était sûrement pas éthéré ou désincarné, car, si Dieu s’est fait homme, ce n’était pas pour se dispenser des conditions réelles de l’existence en notre commune nature.
Il a aimé Simon avec son tempérament impulsif et imprudent, avec sa prétention déclarée de le suivre jusqu’à la mort s’il le fallait, et si même tous les autres venaient à l’abandonner. Il l’a aimé avec ses foucades et ses fautes, comme celle de lui « interdire » la perspective de la Passion, et même son triple reniement.
Il a aimé Thomas, dont l’attachement fut parfois mal inspiré quand les évènements l’avaient déçu. Il a aimé Philippe, capable de se dire satisfait de voir le Père, sous-entendu sans se soucier du Fils. Il a aimé même Judas, celui qui avait donné les signes d’une faille dans l’amitié qui deviendrait à la fin le gouffre de la trahison.
Il les a tous aimés dans leur diversité, avec leurs défauts et infirmités, malgré leur bassesse et leurs péchés, pour de bon. C’est-à-dire qu’il a éprouvé pour chacun d’eux une réelle affection, se réjouissant de leur présence et de leur conversation, trouvant en leur compagnie les bienfaits de l’amitié qui réconforte et comble l’âme.
Frères et sœurs, pour nous aussi il en va ainsi. D’une façon plus mystérieuse encore, le Christ dans son humanité ressuscitée aime chacun de nous d’une affection réelle malgré ses fragilités, ses défauts, ses fautes et ses péchés. Comprenons que c’est cela, nous aimer les uns les autres comme il nous a aimés.
Père Marc Lambret